Adoration
Quai10 - 8 janvier 2020
Quai10 - 8 janvier 2020
Ce mercredi 8 janvier, le Quai10 de Charleroi accueillait en ses murs du côté Parc, Fantine Harduin et Fabrice du Welz pour une avant-première d’exception du film « Adoration ». Déjà présenté au Festival International du Film Francophone de Namur en septembre dernier, au Palace et au cinéma Sauvenière pour d’autres avant-premières, le nouveau long-métrage du réalisateur belge n’a pas fini d’aller à la rencontre de son public puisque les soirées événements s’enchaîneront jusqu’au 15 janvier, date officielle de sa sortie dans nos salles. L’occasion idéale d’échanger avec l’équipe du film et de partager sa vision d’un métrage qui se veut non seulement très photographique mais aussi atypique.
Petit compte rendu de l’entretien post-projection carolo:
Le regard de l’enfance sur le monde
Bien moins « trash » que les deux autres films de sa trilogie ardennaise, « Adoration » se met à la hauteur de deux adolescents prépubères en déroute dans un monde qui les dépasse. A travers ce film, Fabrice du Welz exprime son souhait de se mettre en danger en optant pour un angle neuf : « Si j’ai fait ce film, c’est parce que j’aime danser sur un volcan, pendre des risques et que ce soit casse gueule. Lorsque l’on traite de l’enfance, on revient forcément à la sienne qui, pour beaucoup d’entre nous, reste une plaie béante. Pour une fois, la technicité et le sens du grotesque disparaissent. On se met à nu, on se projette dans la vie et le regard de Paul. On se met dans la peau de cet enfant et on vit avec ses blessures » Si la préparation de son film lui a demandé une attention toute particulière, c’est parce que Fabrice du Welz a du se questionner sur le regard a adopté, sur la façon dont il allait pouvoir se placer à la hauteur du regard de ce garçon qui ne lui est pas totalement étranger mais qui n’est pas vraiment lui non plus. A ce propos, le réalisateur explique combien il n’a pas été facile de trouver le bon « Paul » de son histoire : « Pour Fantine, c’était acquis. Je l’ai rencontrée en 2017 et j’admirais déjà son travail. Pour différentes raisons, le tournage ne s’est effectué qu’en 2018 mais cette année supplémentaire m’a été profitable car elle a acquis plus d’expérience. |
Pour Thomas (Gioria), ça a été plus difficile de le trouver. Je cherchais un garçon à fleur de peau. Aussi, nous sommes allés auditionner des jeunes garçons dans des centres mais aucun d’eux n’avait la discipline nécessaire pour participer à un tournage. Un ami qui s’est rendu à Venise, a vu « Jusqu’à la garde » et m’a appelé en me disant qu’il fallait que je rencontre Thomas. Ça s’est fait peu de temps après, dans une brasserie. J’ai discuté avec sa maman et lui et je lui ais demandé comment il voyait la mise en scène. Sa réponse m’a impressionné car il a simplement dit « je vais écouter » … ce garçon avait tout compris ! Thomas, c’est un ange, une éponge… Il absorbe tout ! Avec Fantine, ils ont travaillé sur leur fébrilité et c’était très impressionnant de les voir évoluer. Il y avait une réelle confiance entre eux. Au fil du temps, ils sont devenus de vrais partenaires de jeu ! »
Fantine
Quand un spectateur exprime son admiration pour la capacité qu’a eue Fantine de changer perpétuellement de registre, la jeune mouscronnoise de presque 15 ans répond : « c’est quelque chose de neuf pour moi de jouer la folie, d’expérimenter ce genre de jeu. C’était très fatiguant mais très riche en même temps. Nous avons beaucoup répété avec Fabrice et Thomas et notre complicité m’a beaucoup aidée. » Pour coller au plus près de la folie souhaitée, Fantine s’est nourrie d’une série de films que lui avait recommandé Fabrice, un réalisateur avec qui la jeune comédienne est particulièrement complice. |
« J’ai joué avec Haneke et avec Fabrice. Les deux sont pointilleux mais il est vrai que j’avais beaucoup plus confiance en Fabrice car je me sentais plus proche de lui. Dans « Happy End », j’étais la seule enfant alors qu’ici, je jouais avec un autre jeune comédien, ce n’était pas du tout pareil. ». Quant au tournage, c’est dans la bonne humeur qu’il s’est déroulé et ce, malgré la difficulté et la fatigue qu’engendrait le rythme soutenu des journées de travail. « On s’est retrouvé avec Thomas et les enfants de Fabrice. Il y avait un petit côté colonie de vacances durant ce tournage. Les journées étaient denses et intenses, mais on s’amusait beaucoup aussi à côté. C’était top ! ». La tête bien vissée sur les épaules, Fantine rougit quand on la complimente sur ses prestations. Néanmoins, la jeune fille avoue, prudente, vouloir terminer ses études et assurer ses arrières car « si pour l’instant, je ne vis pas encore de ce métier, on ne sait pas ce que l’avenir va me réserver. Alors autant que j’apprenne un métier viable ».
La folie et l’intime
A la question « pourquoi la folie ? », Fabrice du Welz répond sans hésiter : « Parce que l’amour absolu, c’est l’amour fou ! Se projeter dans quelqu’un, se donner de façon totale et sans condition, c’est irresponsable… ou de la pure folie. La folie a quelque chose de beau non ? »
La folie et l’intime
A la question « pourquoi la folie ? », Fabrice du Welz répond sans hésiter : « Parce que l’amour absolu, c’est l’amour fou ! Se projeter dans quelqu’un, se donner de façon totale et sans condition, c’est irresponsable… ou de la pure folie. La folie a quelque chose de beau non ? »
Quant à ce besoin de s’ancrer dans l’enfance, c’est parce qu’elle apporte une sensibilité qu’on peut plus facilement amener. « J’ai toujours été inspiré par les cinéastes de l’intime comme Bergman ou Almodovar. Avec « Adoration », j’ai pu me poser des questions sur l’enfance, l’innocence, l’absolu ou l’amour fou. Ces questions et surtout mes réponses, ne sont pas que personnelles. Elles m’ont permises de me mettre à la hauteur du regard d’un enfant prépubère qui tombe amoureux. Ça m’a bouleversé de faire ce film parce qu’il est très personnel mais aussi très intime. Je n’ai pas voulu inscrire de temporalité ni me mettre à la première personne pour fuir toute sorte de réalisme. J’ai voulu rendre physique toutes sortes d’émotions. »
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