"Les Mauvaises herbes"
Rencontre publique avec Louis Bélanger
Rencontre publique avec Louis Bélanger
Propos recueillis par Véronique dans le cadre du FIFF (le 5 octobre 2016)
A la fin de la projection de son film « Les mauvaises herbes » lors du Festival du Film Francophone de Namur, Louis Bélanger a échangé avec les spectateurs et évoque sa dernière réalisation.
Des conditions extrêmes de tournage.
Louis Bélanger a toujours eu envie de filmer la neige. Au Canada, les hivers sont très longs et peu de tournages se font à cette saison. L’histoire du film « Les mauvaises herbes » était toute appropriée pour mettre en scène une poignée de personnages isolés du reste du monde par le froid vigoureux du dehors et travaillant dans une culture de cannabis.
« Nous étions naïfs car, le tournage se déroulant dans un seul lieu (une maison et la grange voisine) et avec peu de matériel, nous pensions que le film ne coûterait pas cher. Malheureusement, nous n’avions pas considéré les besoins des plants de cannabis. On a atteint les températures les plus basses que l’on ait enregistrées ces derniers hivers et il faisait même jusque -35°C dehors. Les comédiens étaient hyper résistants au froid mais ça n’a pas été facile pour eux. »
« Nous étions naïfs car, le tournage se déroulant dans un seul lieu (une maison et la grange voisine) et avec peu de matériel, nous pensions que le film ne coûterait pas cher. Malheureusement, nous n’avions pas considéré les besoins des plants de cannabis. On a atteint les températures les plus basses que l’on ait enregistrées ces derniers hivers et il faisait même jusque -35°C dehors. Les comédiens étaient hyper résistants au froid mais ça n’a pas été facile pour eux. »
Le réalisateur confie que ce qui était le plus terrible, c’était qu’il ne fallait pas laisser les traces de pas de l’équipe dans la neige et que les techniciens faisaient un détour incroyable pour laisser les étendues de neige quasiment vierges. Le directeur technique, très expérimenté, aurait voulu mettre les caméras sur des rails pour faciliter les prises de vue lors des trajets mais c’était impossible, du coup toute l’équipe bossait en raquettes.
Autre problème technique, les batteries des trois seules caméras utilisées pour les prises de vue. Avec le froid, les durées de batteries étaient très courtes et baissaient très vite. |
Filmer le cannabis.
« Les mauvaise herbes », comme son nom l’indique, porte sur la culture de cannabis, économie parallèle pratiquée dans certaines régions du Canada. Louis Bélanger pensait obtenir une dérogation de la part de l’Etat mais bien évidemment, c’était impossible. En effet, pour les besoins du tournage, il lui aurait fallu près de 8000 plants : 2000 boutures, 2000 petits plants, 2000 moyens et 2000 grands avec fleurs. Ce sont donc les faux plants de la série « Weed » et de « Breaking Bad » qui lui ont été prêtés. Très vite, les cameramen se sont rendus compte sur les gros plans que le côté artificiel des boutures était flagrant. Il a donc fallu en faire faire de nouveaux, en feuilles de soie pour que le résultat soit plus naturel. Et heureusement que les plants n’étaient pas des vrais car la nuit, la température de la grange tombait à – 20°C à cause des coupures d’électricité et rien n’aurait survécu à ce froid extraordinaire. |
Dans la législation canadienne, chaque personne peut posséder trois plants pour sa consommation personnelle et l’équipe étant restreinte, nous en avions trop peu » (rires). « Nous ne pouvions de toute façon pas les utiliser car on ne pouvait pas les déplacer et faire un film sur la mariculture avec trois plants. Une trop grande logistique et une incompatibilité avec la loi rendaient l’utilisation de vraies plantes impossible ».
Une installation périlleuse
En plus du froid et des problèmes de logistique relatifs au cannabis, l’équipe du film a du faire face à d’autres imprévus : la maison où se déroule l’intrigue principale était toute petite et des chevaux se trouvaient encore dans la grange. Pour l’installation des lampes et du matériel de culture, Louis Bélanger a fait appel à un « spécialiste », crédité comme technicien au générique. Tout le matériel (de saisie) a été racheté à la province et à la police pour que ce soit réel. Le film, qui a connu un beau succès au Canada, est resté 3 mois à l’affiche et le coût technique a donc largement été amorti. |
La mise en scène de « Mauvaises Herbes » est assez théâtrale parce qu’Alexis Martin, le co-scénariste, est issu du monde du théâtre mais aussi parce que l’histoire se déroule en un seul lieu, contrairement au film précédent qui était un road movie avec une trentaine d’endroits de tournage. « Route 132 » leur a demandé trop de temps, de gestion, trop de déplacements pour l’équipe technique…il fallait faire plus simple ici
Le sujet central du film
L’écriture du film a pris quatre ans de la vie de Louis Bélanger et d’Alexis Martin (le comédien principal dans le film) : ils se voyaient quelques mois par an, le temps de décanter l’écriture et lui apporter un raffinement. Longtemps, ils se sont demandés ce que leur film laisserait derrière lui au point de vue culturel. Ils voulaient créer du sens avec cette communauté qui se met en place le temps d’une récolte.
Ils n’ont donc pas voulu faire un film sur la criminalité mais sur la solidarité. La culture de cannabis n’est qu’un prétexte, elle est accessoire. Le sujet, c’est la vie en autarcie, la survie à plusieurs. Si le scénario du prochain film est déjà écrit, Louis Bélanger garde une part de mystère sur sa prochaine réalisation…
Ils n’ont donc pas voulu faire un film sur la criminalité mais sur la solidarité. La culture de cannabis n’est qu’un prétexte, elle est accessoire. Le sujet, c’est la vie en autarcie, la survie à plusieurs. Si le scénario du prochain film est déjà écrit, Louis Bélanger garde une part de mystère sur sa prochaine réalisation…