Anima 2024
La 43e édition du festival du film d’animation de Bruxelles a bien rempli les salles de projection de la place Flagey, un public familial aussi bien que d’adultes férus du genre ont pu découvrir une programmation riche et variée de films, inédits ou déjà sortis en salles, dans le confort des célèbres studios Flagey ou au théâtre Marni tout proche, avec certaines séances délocalisées à la Cinématek et en province, comme c’est le cas depuis quelques années. Le thème principal cette fois était la science-fiction, l’occasion de revoir le grand classique de René Laloux, « La planète Sauvage » qui a fêté son cinquantième anniversaire l’année dernière, mais aussi de découvrir le nouveau film français que l’on attend ce mois-ci dans nos salles, « Mars Express » de Jérémie Périn et qui a fait l’ouverture du festival.
Au programme, on retrouve un peu de tout : du long métrage, du court métrage, du cinéma francophone, espagnol, anglais, japonais, des films pour les tout-petits, pour les adolescents et d’autres réservés à un public averti ; on fait réellement le tour du monde de ce qui se fait de mieux en animation.
Au programme, on retrouve un peu de tout : du long métrage, du court métrage, du cinéma francophone, espagnol, anglais, japonais, des films pour les tout-petits, pour les adolescents et d’autres réservés à un public averti ; on fait réellement le tour du monde de ce qui se fait de mieux en animation.
- Du rire, des larmes, de l’évasion par écran interposé, des rencontres avec les artistes, des expositions, vraiment un festival très complet - et comme souvent en Belgique, une atmosphère détendue où chacun.e se sent bienvenu.e.
- Parmi les films que j’ai pu voir, j’ai eu un coup de cœur pour « Le Royaume de Kensuke » (Kensuke's Kingdom, 2023), réalisé par Neil Boyle et Kirk Hendry, c’est l’adaptation du roman du même nom (de l’auteur Michael Morpurgo) qui est une variation moderne sur le thème de Robinson Crusoë avec un jeune garçon échoué sur une île au milieu du Pacifique. Une fable écologique émouvante doublée d’une histoire d’amitié intergénérationnelle qui ne laissera personne de marbre. C’est délicat et doux, bien que la violence y soit aussi présente, ce qui réserve le film à un public malgré tout très large allant de 7 à 77 ans (et plus, vous connaissez la formule). De la poésie pour les yeux et une musique au diapason où on retrouve dans la V.O. les acteurs Cillian Murphy, Ken Watanabe et Sally Hawkins, un beau casting vocal !
- « Nina et le secret du hérisson » (2023), un long métrage de Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli qui a le mérite de pouvoir plaire à tous les publics, fable familiale moderne qui suit la famille de la petite Nina : le père qui perd son emploi lorsque l’usine locale ferme, la famille forcément impactée, la plus jeune qui essaie de comprendre à son niveau avec le peu d’informations que ses parents veulent bien lui donner, pensant la protéger. On y reconnaît les déboires vécus par toutes les communautés qui dépendent principalement d’un employeur et lorsque la compagnie met la clé sous la porte, les perspectives de retrouver un emploi se font rares, à moins d’aller le chercher ailleurs. Ce point de départ dramatique laisse par bonheur sa place à une chasse au trésor pour la petite Nina et son ami Mehdi, en forme d'échappatoire le temps d'un été; c’est plein de rebondissements et la morale est sauve à la fin. Guillaume Canet et Audrey Tautou prêtent leur voix aux parents de Nina, la petite fille pleine de ressources et d’imagination qui entame une discussion avec un personnage imaginaire, le petit hérisson héros des histoires que lui raconte son père.
« Heavies Tendres » (2023), un film en langue catalane réalisé par Carlos Perez-Reche et Joan Francesc Tomas Monfort, l’adaptation cette fois d’une bande dessinée autobiographique de l’Espagnol Juanjo Sáez. Une première fois adaptée en série animée, le long métrage respecte à la lettre le style graphique du dessinateur (les visages n’ont pas de traits, la découpe des scènes ressemble à des cases de BD et les mouvements sont assez statiques). On y suit une année scolaire dans la vie de deux ados fans de heavy metal que rien jusque-là ne destinait à être amis. |
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On y traite de tous les sujets qui touchent à l’adolescence - harcèlement scolaire, conflits parents-enfants, drogue, alcool, premiers émois amoureux – le temps d’une chronique singulière où les deux personnages principaux se révèlent attachants. Quand on sait que l’action se passe dans le quartier appauvri de La Sagrera à Barcelone pendant la préparation des Jeux Olympiques de 1992, tous les éléments sont installés pour accompagner ce duo de rockeurs au cœur tendre.
Le coréalisateur Carlos Perez-Reche et le directeur de l’animation Víctor Rago étaient présents à Bruxelles pour présenter leur film, voici quelques morceaux choisis de la session de questions-réponses organisée au théâtre Marni après la projection :
Le coréalisateur Carlos Perez-Reche et le directeur de l’animation Víctor Rago étaient présents à Bruxelles pour présenter leur film, voici quelques morceaux choisis de la session de questions-réponses organisée au théâtre Marni après la projection :
- Carlos Perez-Reche prête sa voix à l’un des personnages du film, le professeur qui est le seul à soutenir les deux ados à l’école.
- Si le thème du film est fortement basé sur la musique hard rock, les droits des chansons originales utilisées dans l’histoire sont hors de prix pour une production espagnole. Ce sont donc des versions alternatives suffisamment proches pour reconnaître les titres originaux qui sont entendues dans le film.
- Réaliser un film d’animation en respectant à la lettre le style graphique de la BD, ce n’est pas simple. Comme l’expliquait Victor Roga, il a dû s’obliger à ne pas penser en termes d’animation, afin de garder l’esprit des cases très simples, chaque scène devait être déconstruite pour arriver au résultat le plus épuré et ne pas chercher à faire les enchaînements les plus cool comme il aurait été tenté de le faire en temps normal.
- Le créateur de la BD Juanjo Saèz les a laissés expérimenter avec les proportions des personnages selon les besoins des plans (taille des mains, longueur des cheveux) afin de créer de la vitalité dans les images animées.
- Il est difficile de faire financer des films d’animation en Espagne à l’heure actuelle, sans coproduction entre plusieurs régions ou même plusieurs pays, ce serait quasiment impossible. C’est pourquoi beaucoup d’animateurs espagnols partent travailler à l’étranger, et cela devient problématique de trouver des artistes prêts à travailler en Espagne, notamment à Barcelone car un film d’animation représente plusieurs mois de mise à disposition sur place.
- « Phoenix : Reminiscence of flower » (Hinotori Eden no Hana, 2023) est le dernier film vu de cette édition, et encore une fois c’est l’adaptation d’un manga, celui-là culte puisqu’il provient du manga-fleuve écologique du grand Osamu Tezuka paru entre les années 1960 et 80. Le chapitre mis en images dans ce long métrage correspond en fait à la série animée Phoenix : Eden 17 disponible sur Disney+ depuis quelques mois, et serait donc une sorte de remontage des épisodes. Une animation léchée, fluide et très agréable à suivre pour un thème futuriste qui n’est plus si original : la Terre est devenue inhabitable et les Humains cherchent une colonie où s’établir. Romy et son compagnon voyagent en animation suspendue vers l’une de ces planètes habitables, ils l’espèrent. Tout ne va évidemment pas se passer aussi bien qu’ils le souhaitent, entre accidents de biostase et voyages dans le temps et l’espace, l’action ne manque pas de péripéties alors que les personnages sont confrontés à toutes sortes de mésaventures psychologiquement bouleversantes, voire tirées par les cheveux, et qui auraient eu besoin d’une mise à jour pour le 21e siècle, selon moi. Parfois, respecter le matériau d’origine n’est pas toujours une bonne idée, certains dialogues ou développements de traits de personnalité pouvant faire rouler des yeux les spectateurs exigeants en 2024.
Pour la partie activités pendant le festival, on pouvait découvrir cette année une plaine de jeux virtuelle et des ateliers pour les plus petits, les figurines articulées du court métrage de stop motion animation Beautiful Men de Nicolas Keppens étaient exposées et les robots particuliers de Jan de Coster pouvaient être approchés au plus près.
Passons au palmarès de cette année : Prix du meilleur long métrage à Sultana's Dream, Prix du meilleur long métrage pour enfants à Linda veut du poulet, Prix du public pour ces mêmes catégories à La jeune fille et les paysans et Linda veut du poulet. De nombreux courts métrages ont également été célébrés dans plusieurs catégories que vous pouvez retrouver ici.
Pour continuer le festival chez soi, la plateforme belge de streaming Sooner propose sa sélection de films d’animation en marge du festival jusqu’à la fin du mois de mars, des courts et des longs métrages avec un focus sur la science-fiction permettant de (re)voir entre autres La Planète Sauvage, Belle ou encore The Congress.
Passons au palmarès de cette année : Prix du meilleur long métrage à Sultana's Dream, Prix du meilleur long métrage pour enfants à Linda veut du poulet, Prix du public pour ces mêmes catégories à La jeune fille et les paysans et Linda veut du poulet. De nombreux courts métrages ont également été célébrés dans plusieurs catégories que vous pouvez retrouver ici.
Pour continuer le festival chez soi, la plateforme belge de streaming Sooner propose sa sélection de films d’animation en marge du festival jusqu’à la fin du mois de mars, des courts et des longs métrages avec un focus sur la science-fiction permettant de (re)voir entre autres La Planète Sauvage, Belle ou encore The Congress.