Du roman à l'écran
"Une histoire d'amour" de Alexis Michalik
Réédité avec l’affiche du film à l’occasion de sa sortie en salle, « Une histoire d’amour », la pièce de théâtre vaut véritablement la peine que vous vous plongiez dans sa lecture.
Que ce soit avant la vision du film, après ou indépendamment de celle-ci, (re)vivre les aventures sentimentales de Katia, Justine, William, Jeanne ou encore Claire est l’occasion parfaite de faire battre notre cœur, de prendre de plein fouet les émotions fabuleusement écrites par un Alexis Michalik toujours aussi inspiré. Si quelques changements de lieux sont (logiquement) opérés dans le long-métrage, on retrouve en tout point les temps forts d’une histoire où les destins croisés vont influer les uns sur les autres, changer chacun de ses protagonistes et durablement nous marquer. Suivi de « Intra muras » dans cette édition parue chez « Le livre de poche », « Une histoire d’amour » (et ses 175 pages que l’on dévore en moins d’une heure) est un must have, un must read à mettre entre toutes les mains ! |
► Infos pratiques
La pièce de théâtre: "Une histoire d'amour". Réédité le 19 janvier 2022 chez Le Livre de Poche - 352 pages
Le film: "Une Histoire d'Amour" de Alexis Michalik - sorti dans les salles le 12 avril 2023, avec Alexis Michalik, Juliette Delacrois, Marica Delacrois et Léontine D'oncieu de la Batie
La pièce de théâtre: "Une histoire d'amour". Réédité le 19 janvier 2022 chez Le Livre de Poche - 352 pages
Le film: "Une Histoire d'Amour" de Alexis Michalik - sorti dans les salles le 12 avril 2023, avec Alexis Michalik, Juliette Delacrois, Marica Delacrois et Léontine D'oncieu de la Batie
"La daronne" de Hannelore Cayre
Deuxième roman de Hannelore Cayre, « La Daronne » s’est vu adapté à l’écran par Jean-Paul Salomé, le réalisateur français d’ « Arsène Lupin, « Belphégore, le fantôme du Louvre », « Les femmes de l’ombre » ou encore de « Je fais le mort ». daptation correcte d’un roman qui vaut le détour, on vous parle ici de sa transposition et de ses (in)fidélités. 50% flic, 50% dealeuse, 100% pure Solitaire, excentrique et haute en couleur, Patience Portefeux est une femme forte qui a toujours appris à se débrouiller. Interprète pour la brigade des stups de Paris, la quinquagénaire connait tout du monde des petits délinquants et des trafiquants de drogue s’approvisionnant au bled. Aussi, lorsqu’elle comprend que l’une de ses écoutes est sur le point d’aboutir à l’arrestation du fils d’une connaissance, Patience décide d’interférer dans l’enquête et de prendre sa part du marché illégal au passage… Une idée originale d’Hannelore Cayre qui aurait pu faire des étincelles sur le grand écran… |
En rendant son histoire moins tragique et en faisant l’impasse sur certains épisodes de la vie de Patience Portefeux, en simplifiant l’intrigue et rendant le personnage d’Isabelle Huppert trop investi et proche des enquêtes menées par le service des stups de la ville de Paris, on perd de nombreux enjeux et rebondissements qui faisaient tout le sel du roman.
Adapter une histoire aussi décalée et truculente en 1h45 de film n’est pas chose aisée, on le comprend mais en décidant de développer la vie familiale de Patience au détriment de certains éléments importants du roman (le blanchiment d’argent obtenu via de multiples transactions), en minimisant certains pans de son caractère et appuyant un peu trop sur d’autres, l’équilibre entre le récit initial délicieux d’Hannelore Cayre et le film commun de Jean-Paul Salomé s’en trouve branlant.
Si Isabelle Huppert incarne de façon plutôt convaincante cette Patience à double jeu, on préfère nettement notre représentation mentale de cette héroïne hors du commun plutôt que celle donnée par le réalisateur. |
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Les différences entre le roman et le film sont nombreuses et on ne retrouve finalement que peu l’atmosphère délirante de « La Daronne » littéraire : Patience n’a pas les cheveux blancs et n’investit pas dans un nouvel appart, elle est très impliquée dans les enquêtes (de façon presque irréaliste) et les écoutes qui vont être traduites, elle ne rencontre pas les enfants de Mme Léger, le sort d’Afid, de Khadidja et de la bande de bras cassés formés par Chocapic et Scotch est enjolivé, sa vie est moins détaillée et ses filles très omniprésentes alors que Patience est une femme plutôt solitaire et vit beaucoup dans le passé. Hormis ses relations avec Mme Fo et son intrigue principale, tout est facilité, réduit, moins développé, des petits détails sont évoqués mais altérés et font perdre un peu de leur importance ou dans leur densité.
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En définitive, nous ne saurions que vous conseiller de découvrir le roman d’Hannelore Cayre bien plus fun et maîtrisé que le film qui l’a adapté.
► Infos pratiques Le roman: "La Daronne" de Hannelore Cayre (grand prix de littérature policière et prix « Le point » du polar européen) est paru le 13 février 2020 chez Points - 192 pages. Le film: "La Daronne" de Jean-Paul Salomé - sorti dans les salles le 9 septembre 2020, avec Isabelle Huppert, Hippolyte Girardot, Farida Ouchani, Liliane Rovère, Rachid Guellaz et Mourad Boudaoud. |
"Ete 85" de Aidan Chambers
Cet été, vous avez probablement gagné le large de la Normandie aux côtés d’Alexis et de David, les deux héros attachants du dernier film de François Ozon, une adaptation maîtrisée et réussie du roman « La danse du coucou » renommée à l’occasion de sa nouvelle édition « Eté 85 ». Si l’on distingue bien sûr quelques divergences avec le roman d’Aidan Chambers, on est particulièrement étonnés du grand respect apporté par le cinéaste dans son adaptation ciné, à commencer par les dialogues, identiques jusque dans leurs moindres virgules et respirations, répliques dont chaque mot est pensé et interprété magistralement par ses deux jeunes comédiens et habité par une sincérité et une profondeur que l’on avait appréciées.
Une belle promesse tenue… Si François Ozon prend le pari de ne pas révéler ce dont est accusé Alexis en début de son film, le livre, lui, nous le révèle dans ses premières lignes. Parfois critiqué, ce choix n’est pourtant pas dénué d’intérêt. |
Alors que le roman évoque les agissements étranges de Henry et les bouleversements intérieurs du jeune homme, le long-métrage les évoque en substance, les révélant un peu plus à mesure que le cinéaste divulgue ce qui créait son suspense durant une bonne partie du métrage. Les intentions sont certes différentes mais le résultat reste finalement identique car plus que le final et son couperet, c’est le chemin parcouru par nos deux jeunes héros qui importe, leurs sentiments, leurs découvertes et leurs profondes émotions. Point de boîte de haricots magiques dans le film d'Ozon, pas de flirt avec le gentil Spike et pas de flash back dans le passé de Henry/Alexis. François Ozon épure sans dénaturer, met en images et nous laisse vibrer
Côté divergences, on relève aussi des changements minimes de (pré)noms des protagonistes (Henry et Barry deviennent Alex et David, Kari est renommée Kate alors que le professeur de lettres Monsieur Ozzman se francise pour un Monsieur Lefèvre plus bleu blanc rouge). Les lieux de l’intrigue se déplacent de la côte anglaise vers la Normandie et le magasin de vinyles se transforme en boutique d’articles de pêche et de souvenirs. La plus grande différence reste l’époque dans laquelle se déroule l’intrigue. Avec l’aval de l’auteur (la postface permet de mesurer son enthousiasme face à la réappropriation du réalisateur), François Ozon a décidé d’ancrer son histoire dans les années 80, époque à laquelle ce dernier, adolescent, a découvert le récit originel qui l’a bouleversé et qu’il a finalement adapté sur grand écran.
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La découverte d’un premier Amour, celui que l’on écrit avec un grand A dans sa mémoire et dans son cœur, l’inquiétude d’une mère, la recherche identitaire difficile d’adolescents en quête de repères, le besoin de vivre et de se construire un avenir sont autant de sujets qui infusent dans ce livre et dans ce film de grande qualité, deux objets passionnants qu’on ne peut que vous recommander.
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► Infos pratiques Le roman: "Eté 85" ("La danse du coucou" dans sa première édition, "Dance on My Grave" en version originale) de Aidan Chambers Réédité en juillet 2020 par Points - 336 pages Le film: "Eté 85" de François Ozon - sorti dans les salles le 15 juillet 2020, avec Félix Lefebvre, Benjamin Voisin, Melvil Poupaud, Isabelle Nanty, Philippine Velge et Valeria Bruni Tedeschi |