Si le manque d’incision du film de Jay Roach fait de lui un métrage souvent inégal, son casting féminin impeccable et l’implication sans faille de son trio d’actrices rendent ce « Scandale » appréciable à plusieurs niveaux. Un parfum de scandale… A l’instar de l’organisation du building Fox Corporation, c’est à certains étages du métrage que se joue l’intrigue de « Scandale» aussi inconstant que la carrière de certaines animatrices et journalistes vedettes de la chaîne. Si son prologue annonce clairement la couleur (certains noms ont été inventés de toute pièce et certains scènes et dialogues changés pour les besoins du film) et que les premiers pas hésitants nous font perdre le fil d’une histoire qui gagne en intensité au fil de ses deux petites heures, on ne peut que se demander les raisons qui ont poussé Jay Roach à mettre en lumière un sujet en or et on ne peut plus actuel avec autant de platitude. Les films et autres documentaires destinés à dénoncer les harcèlements sexuels étant de plus en plus nombreux, il aurait fallu que « Bombshell » fasse un peu plus d’étincelles pour se démarquer d’une concurrence rude et bien plus investie dans le combat qu’elle mène. L’affaire du harcèlement sexuel chez FOX se déroule quelques mois avant la détonation du célèbre mouvement #MeToo, lorsque Gretchen Carlston, licenciée sans motif apparent, décide d’attaquer en justice, Roger Ailes (presque méconnaissable John Lithgow), le célèbre dirigeant de la chaine Fox News. Dénonçant les actes condamnables de magnats et hauts-placés qui dirigeaient leur petite entreprise en toute impunité et l’abus de pouvoir depuis trop longtemps exercés, « Scandale » donne une voix aux femmes bafouées et embauchées pour la beauté de leurs jambes et leur physique plaisant à regarder. Et c’est d’ailleurs là que le bât blesse. En s’appuyant de façon excessive sur un manichéisme peu subtil, Jay Roach caricaturerait presque le monde des médias et de la politique, mais aussi les relations qui animent patron et employées dans un rapport de force qui nécessite un perpétuel besoin de reconnaissance et d’identité, de subordination et de supériorité. Les trois blondes peroxydées incarnées pourtant brillamment par Nicole Kidman, Charlize Theron et Margot Robbie se ressemblent presque dans les traits mais ont une approche bien différente de la réussite et du harcèlement dont elles toutes victimes. Et si la petite dernière Kayla est un personnage sorti tout droit de l’imagination du scénariste Charles Randolph, c’est sans aucun doute pour représenter la fragilité et la naïveté de certaines femmes fortes avalées par un système où la méritocratie n’est pas totalement appliquée. 50 nuances de sexisme Après une installation en bonne et due forme de l’ambiance de travail au sein de la Fox et un petit tour du propriétaire organisé par Megyn Kelly (Charlize Theron) vedette de la chaîne et personnage principal du présent métrage, on entre peu à peu au cœur du problème non sans détour dans sa vie privée et ses altercations avec un candidat aux élections présidentielles rustre et irrespectueux de la condition féminine, point d’ancrage un peu grossier d’un climax qui ne fera que se détériorer. Distillant tantôt quelques extraits de témoignages réels ou des confidences face-caméra de ses héroïnes, nous perdant dans les couloirs d’une rédaction où soutien et contestations se font face et accordant des visions radicalement différentes de mêmes faits, « Bombshell » ressemble davantage à une ébauche de film qu’à un produit abouti. Nécessaire et particulièrement actuel, le film de Jay Roach aurait pu s’avérer bien plus efficace. En axant son propos sur la difficulté de trouver d’autres témoignages accablants plutôt que se centrer sur les rouages du mécanisme machiavélique du harcèlement moral et sexuel au travail, le film perd en intensité et ne marquera véritablement les esprits que par l’efficacité de son casting. ► Les bonus. D’une durée d’une bonne heure trente, le making of de « Bombshell » est riche et ultra complet à tel point qu’il vous redonnera envie de vous plonger dans le film de Jay Roach une fois celui-ci terminé. Décomposé en 7 chapitres distincts (Convergence, l’origine du film, quid pro quo : Charlize, Nicole, Margot et John, Dynamique d’équipe : le casting, Briser le quatière mur : la conception visuelle, couche par couche : maquillage, coiffures et costumes, des compétences uniques : Jay Roach, catalyseur de changement : réflexion), cet imposant contenu additionnel est l’un des plus riche qu’il nous ait été donné de voir. Pour notre part, nous avons choisi de partir dans une vision enchaînée de ces sept angles de vue savamment présentés par l’équipe complète d’un film où chacun s’est impliqué. Des explications de Charles Rondolph (le scénariste du film) à l’investissement du moindre second rôle, ce long bonus passe en revue de nombreuses thématiques. Qu’il s’agisse du choix opéré pour évoquer l’histoire présentée, de l’importance de le faire par le biais de trois histoires de femmes aux vérités psychologiques bien différentes, de l’implication sans faille d’une Charlize Theron actrice et productrice du film, de l’envie de voir une femme réaliser le film avant de le faire diriger par un Jay Roach multi-fonction et hyper bienveillant ou encore de l’importance de s’adresser aux hommes pour évoquer une problématique toujours d’actualité, tout est survolé durant 90 minutes où on ne voit pas le temps défiler. Ecrit pour appuyer le mouvement MeToo mais empreint d’une empathie bienvenue pour mener un film avec le point de vue d’un homme, « Bombshell » a pour but principal de mettre en lumière et surtout de faire comprendre le processus du harcèlement au travail dans ses différentes formes. La vision des personnages féminins sur une situation difficile à vivre, leurs ressentis, leurs caractères et l’interprétation magistrale de Charlize Theron, Nicole Kidman et Margot Robbie, trois comédiennes investies et totalement acquises à une cause qu’elles défendent avec brio, est amenée de façon tellement convaincante que le public ne peut qu’accrocher à cette histoire malheureusement basée sur une lourde vérité. Leur préparation intense et le souci du détail apporté par les équipes techniques, la complicité et l’amitié que certains comédiens ont les uns pour les autres, le lien qui les unit et parfois l’admiration que certains provoquent auprès de leurs camarades de jeux, l’osmose complète qui opère auprès du casting mais aussi chez les chefs décorateurs, maquilleurs ou stylistes, le temps passé à vouloir rendre le tout cohérent et authentique, tout est passé au crible pour fournir un making of ultra-complet. Rien n’est laissé de côté. Chaque comédien a la possibilité de s’exprimer, qu’il soit au premier ou second plan du métrage, Barry Ackroyd évoque avec nous les techniques et les champs utilisés pour rendre le film de Roach le plus probant possible. De la maquette de la News Corp aux prothèses utilisées sur John Lithgow, de l’importance de coller au plus près de la réalité au portrait d’un réalisateur apprécié par son équipe entière, tout tout tout, vous saurez tout sur les coulisses de « Bombshell ». Joliment mis en scène par une intro visuel démarquant chaque chapitre de son making of, l’ensemble de ces bonus tend vers une même et seule idée. Démontrer que le film n’est qu’une caisse de résonnance d’une réalité encore négligée, une illustration actuelle d’une envie de dénoncer les pratiques de harcèlement mise en place dans un milieu social a priori sécuritaire, sans créer une culpabilité collective mais susciter une interrogation chez les femmes comme chez les hommes d’aujourd’hui et de demain… Parce que notre société et sa mentalité doivent changer pour permettre un respect mutuel, quel que soit le sexes, l’orientations sexuelle ou politique de chacun Genre : Drame/Biopic Durée du film : 1h49 Durée des bonus: 1h30 comprenant un bonus riche et complet sur les coulisses du film et sa préparation
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