Résumé du film : À plus de 80 ans, Earl Stone est aux abois. Il est non seulement fauché et seul, mais son entreprise risque d'être saisie. Il accepte alors un boulot qui, en apparence, ne lui demande que de faire le chauffeur. Sauf que, sans le savoir, il s'est engagé à être passeur de drogue pour un cartel mexicain. Extrêmement performant, il transporte des cargaisons de plus en plus importantes. Ce qui pousse les chefs du cartel, toujours méfiants, à lui imposer un "supérieur" chargé de le surveiller. Mais ils ne sont pas les seuls à s'intéresser à lui : l'agent de la DEA Colin Bates est plus qu'intrigué par cette nouvelle "mule". Entre la police, les hommes de main du cartel et les fantômes du passé menaçant de le rattraper, Earl est désormais lancé dans une vertigineuse course contre la montre... Note du film : 8/10 (par Véronique) Avis : A 88 ans, Clint Eastwood n’a pas fini de nous étonner. Après un déraillement dispensable qui nous laissait craindre une difficile remontée en selle, le revoici devant et derrière la caméra d’un nouveau drame biographique de grande qualité : « La mule ». Papy Clint est de retour et fait redorer ses lettres de noblesse avec l’histoire incroyable et pourtant vraie de ce vieil Earl Stone. Une mule âgée et têtue. Inspiré de la vie de Léo Sharp (renommé ici Earl Stone pour les besoins du film), « La mule » nous conte les nombreux va-et-vient entrepris par un octogénaire, ancien vétéran de guerre (ici de celle du Vietnam alors que Léo Sharp avait pris les armes lors de la Seconde Guerre Mondiale) et passionné des hémérocalles. Exproprié de chez lui, désargenté et coupé de sa famille (qu’il a toujours laissée de côté au profit des compétitions florales et des récoltes et cultures de fleurs multicolores), le vieux Earl est contraint d’abandonner les terres qui lui étaient chères et de trouver refuge ailleurs, emmenant dans son ancien pick up quelques maigres souvenirs de sa vie d’antan. Fort heureusement pour lui, Earl fait la connaissance d’un jeune latino qui lui propose de devenir transporteur pour des amis à lui. Voyant là l’opportunité de se refaire financièrement, notre vieil américain accepte et se retrouve à sillonner les routes des USA du Sud au Nord sans savoir ce qu’il transporte vraiment. Faussement naïf, plus solide qu’il n’y parait, Earl va ainsi entrer en contact avec diverses branches d’un cartel qui fait frémir les membres de la DEA (le service de la police fédérale chargé du contrôle des drogues). Tournage en famille. Pour rendre ce fabuleux projet possible, Clint Eastwood a su s’entourer de nombreux collaborateurs avec qui il a déjà réalisé des merveilles par le passé. Ainsi, le scénario de « La Mule » est écrit par Nick Schenk, à qui on doit le mémorable « Gran Torino ». Pas étonnant dès lors que l’on retrouve cette patte qui nous a fait (sou)rire il y a dix ans de cela, cet humour grinçant et parfois politiquement incorrect qui amuse le public et colle si bien à la peau de feu Inspecteur Harry. Assagi, moins rustre que dans d’autres de ses rôles, Clint Eastwood fait ce qu’il sait faire de mieux, mais avec un peu plus de retenue. Lui qui continue d’impressionner son entourage par son énergie débordante et sa rage de vivre a dû se contenir ici et adopter les attitudes d’un vieux monsieur qui ne lui correspond pas tout à fait. Il confie d’ailleurs qu’il s’est inspiré du travail de son propre grand-père, éleveur de poulets. Ce « viejo » qu’il incarne à l’écran nous fait mal au cœur, nous touche par l’envie de recoller les morceaux, d’offrir du temps à ceux qu’il a trop longtemps négligé. Sa famille, exclusivement féminine, a fait sa route, le laissant sur celles qui l’emmenaient de concours en échanges de boutures, de bars en colloques horticoles. Et pour donner de la profondeur à la véracité des sentiments, Clint a demandé à sa fille Alison de tenir le rôle d’Iris, la fille unique de Earl. Dans les têtes connues du cinéma de Clint, on retrouve aussi celle de Bradley Cooper, son fabuleux tireur d’élite dans « American Sniper » (dont il a, pour la petite anecdote, produit le premier long-métrage, « A Star is born »). Chargé de traquer cette mule trop efficace, l’agent Bates aura bien du fil à retordre pour identifier et arrêter ce livreur de tous les records. Évoluant parallèlement dans un suspense faussement intenable, les deux personnages ont bien des choses en commun. D'ailleurs, les rares rencontres entre Bradley Cooper et Clint Eastwood apportent une belle humanité au film et montrent combien l’acteur réalisateur a bien fait de s’exposer à nouveau sous les objectifs de ses caméras. On the road again Ce qui étonne dans le dernier long-métrage de Clint Eastwood, c’est son histoire invraisemblable et pourtant vraie. Leo Sharp est en effet devenu la meilleure mule du Cartel de Sinaloa à la fin des années 80 alors qu’il était âgé de 90 ans ! Lui qui n’avait jamais été condamné par la justice, qui n’a reçu aucune contravention ni aucun procès pour excès de vitesse, transportait des centaines de kilos de drogue du Texas à l’Illinois sans se faire pincer par les forces de l’ordre. Bien sûr, pour donner un certain modernisme à l’histoire, Nick Schenk a transposé les faits à notre époque, s’amusant de certaines de nos manies et addictions. Mais ce qui fait ressortir le film du lot, c’est le message livré en substance, de façon parfois peu subtile, celui de l’importance de la famille et des moments précieux que l’on ne peut revivre une fois révolus. Quels souvenirs garderons-nous au crépuscule de notre vie ? Quel temps aura été le plus précieux : celui consacré à notre passion, à notre travail ou celui passé en famille ? Prétexte bien ancré dans le scénario, ce sentiment rayonne à mesure que l'histoire avance et prend une place considérable dans le coeur de son personnage principal comme dans celui des spectateurs. Marqué par les événements familiaux auxquels il n’avait jamais pris part, le personnage de Earl évolue à tout point de vue. On le voit au fil des (presque) deux heures de film, ce petit vieux paumé et accablé par la vieillesse devient la star du cartel et cela, on le mesure tant dans ses attitudes que dans les surnoms dont il est affublé : de viejo (petit vieux), il devient abuelito (le grand père) pour finir par être le « caïd » de la bande. Mieux, il devient le sauveur du club de vétérans de son quartier et le grand-père généreux ne lésinant devant rien pour faire, enfin, le bonheur de sa famille... Sous sa facture classique et sa maîtrise presque ordinaire, « La mule » révèle des valeurs sûres et une histoire qui parle à bon nombre d’entre nous. On se prend de sympathie pour ce Earl foireux et aventureux, on s’amuse des entourloupes dont il use (et abuse) et on se dit que décidément, Clint Eastwood a bien fait de revenir à ce qu’il sait faire de mieux et nous fait largement oublier le naufrage dans lequel il s’était enlisé l’an dernier. Date de sortie en Belgique/France : 23 janvier 2019 Durée du film : 1h57 Genre : Drame Titre original : The mule
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