Résumé du film : À Newcastle, Ricky et sa famille se battent contre la précarité depuis quelques années. Pourtant, ni Ricky ni son épouse Abby n’ont cessé de travailler. Alors qu’il est temporairement sans emploi, Ricky voit dans l’opportunité de devenir chauffeur-livreur à son compte, avec son propre camion, une formidable occasion de s’en sortir. Abby, aide-soignante à domicile, l’aide à réaliser son projet en vendant sa propre voiture. Mais Ricky doit rendre des comptes à la société de transport qui lui assigne ses courses et contrôle son travail, et finalement sa vie et celle des siens. Commence alors pour toute la famille la spirale infernale des pièges de l’uberisation... Note du film : 8/10 (par Véronique) Avis : Nouveau long-métrage de Ken Loach, « Sorry we missed you » est un film nécessaire et poignant, dans la continuité de ce qui avait déjà entamé avec « Moi, Daniel Blake » sorti trois ans plus tôt. Le réalisateur britannique a beau avoir une longue filmographie derrière lui et quelques années au compteur, il n’est pas près de se taire et dénonce des faits sociétaux avec la même férocité et la même pudeur. Après la fracture numérique et ses conséquences sur les demandeurs d’emploi dépassés par une technologie hyper banalisée, voici à présent une nouvelle dérive de notre société moderne mais aussi clivante : l’ubérisation. A l’heure où les ventes par Internet explosent et les livraisons à domicile se multiplient à une vitesse impressionnante, on découvre combien de nombreux emplois créés pour satisfaire les clients pressés peuvent broyer leurs employés mais aussi des familles entières privées de temps... et de liberté. Ricky ou l’enfer de la vie Ricky, père de famille débrouillard et désireux de donner le meilleur à sa famille (pourtant privée de plaisirs simples), voit dans le boulot de coursier indépendant une parfaite occasion de surfer sur l’ultra-rapidité de la consommation croissante. Après avoir investi les dernières économies familiales dans l’achat d’un petit fourgon pratique, le jeune britannique découvre les coulisses du monde chronophage de la livraison expresse. Ses journées à rallonge, dictées par une black box onéreuse, s’enchaînent, le vidant de toute son énergie et le privant de moments en famille. Sur les routes du matin jusque tard le soir, Ricky n’a que quelques minuscules minutes pour se dégourdir les jambes, manger, livrer ses petits paquets minutieusement triés avant de repartir à l’autre bout d’une ville embouteillée, nerveuse où accidents et autres complications l’attendent au tournant. Prisonnier d’un cercle vicieux dont il ne peut s’extraire, le père de famille va peu à peu s’attirer une succession de galères... Film coup de poing dont on ne peut sortir indemne, « Sorry we missed you » décrit les dérives d’un système, d’une société où l’individu n’a plus sa place ni de raison d’exister si ce n’est celle d’aller travailler. Broyés par les dettes, les difficultés quotidiennes, Ricky, Abby et leurs enfants sont indirectement les victimes d’un mode de consommation que l’on sait prégnant. Nécessaire et alarmant, le dernier film de Ken Loach continue de pointer du doigt une société où chacun doit entrer dans le rang, se réactualiser sil ne veut pas se faire abandonner. « Marche ou crève », cette expression résumerait presque à elle seule les dénonciations faites par l’octogénaire depuis de nombreuses années et multirécompensé pour avoir à ce point été concerné et impliqué. Comme toujours, les interprètes des histoires créées de toutes pièces par son acolyte de toujours, le scénariste Paul Laverty, forcent notre respect. Kris Hitchen, Debbis Honeywood, Rhys Stone et même la toute jeune Katie Proctor donnent vie à cette petite famille plus vraie que nature, impressionnante et touchante, une de celles que l’on voudrait pouvoir aider tant la détresse qui s’en dégage parvient à nous concerner. Date de sortie en Belgique : 30 octobre 2019 Durée du film : 1h40 Genre : Drame
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