Note du film : 7,5/10 (par Véronique) Résumé du film : Boris et Zhenya sont en train de divorcer. Ils se disputent sans cesse et enchaînent les visites de leur appartement en vue de le vendre. Ils préparent déjà leur avenir respectif : Boris est en couple avec une jeune femme enceinte et Zhenya fréquente un homme aisé qui semble prêt à l’épouser... Aucun des deux ne semble avoir d'intérêt pour Aliocha, leur fils de 12 ans. Jusqu'à ce qu'il disparaisse. Avis : Récompensé par le Prix du Jury lors du dernier Festival de Cannes, « Loveless » (« Faute d’amour » en version française), est un film brut, prenant et émouvant. Un long métrage dur, dans une Russie en déperdition, à l’image de ce couple qui se déchire, se projette dans de nouveaux projets mais n’assume pas leur passé commun… et leur fils. Tous deux tournés vers l’avenir (une nouvelle paternité pour l’un, un nouvel amant argenté pour l’autre), Genia et Boris peinent à communiquer et à se mettre d’accord sur la façon de gérer au mieux leur divorce et tout ce que cela inclus. Vendre l’appartement, se partager la garde d’Aliocha, leur petit garçon de 12 ans, voilà deux sujets houleux pour notre ancien couple qui ne sait peut-être jamais véritablement aimé. Tout semble leur importer... Sauf que si se séparer d’un lieu de vie est plus anecdotique, se renvoyer la garde d’Aliocha ou envisager de le mettre en pension a de lourdes conséquences sur ce tout jeune adolescent en souffrance. En colère contre ses deux parents, le garçonnet pleure toutes les larmes de son corps, dans un mutisme douloureux, que seul le spectateur ému pourra mesurer. Profondément meurtri, Aliocha disparaît le lendemain matin, sans que personne ne s’en aperçoive, du moins, durant de nombreuses heures. Trop occupés à partager la vie de leur nouveau conjoint, les parents d’Aliocha découvrent, un peu tard, son inquiétante disparition… Ce qui nous marque dans la vision du film, c'est qu'aucun des deux parents ne connaît véritablement son enfant : le nom de leur petit camarade de classe et ami, les lieux où il peut passer son temps libre, l’objet de sa fugue, aucune réponse ne leur vient. Trop occupés à se renvoyer la faute, ils s’investissent peu dans les recherches actives menées par une association de disparition d’enfants. La bureaucratie étant bien trop lente, ils n’ont d’ailleurs d’autres solutions que de remettre la vie de leur enfant dans les mains de ces inconnus plus déterminés qu’eux à faire toute la lumière sur cette fugue inopinée. A travers son histoire plutôt convenue, le réalisateur Andreï Zviaguintsev, nous entraîne dans un drame sombre et froid, à l’image de cette Russie peu accueillante et presque robotisée. La noirceur de son sujet, l’égoïsme évident des principaux protagonistes nous renvoient à une réalité qui fait mal à voir. Mais peut-on vraiment blâmer ces parents, égocentriques et peu empathiques ? Au regard de leur passé, on se rend compte qu’eux aussi ont manqué cruellement d’amour (parental ou conjugal) et que leurs fêlures sont aussi vives que celle de leur enfant. Apparemment mariés sans sentiment, ce couple n’a jamais fait que chercher un peu d’amour, ne sachant comment le donner puisque eux même ne l’ont probablement jamais véritablement reçu. Les fautes (ou manques) d’amour sont plurielles et touchent chaque membre de cette famille dysfonctionnante, dans un pays tout aussi bancal. La comparaison avec « Une femme douce », de Sergei Loznitsa est d’ailleurs très tentante pour la présentation de cette Russie en chute libre, où la bureaucratie est excessivement lente. Mais la similitude peut s’arrêter là tant le traitement et le sujet central n’ont finalement que bien peu de choses en commun. Présent sur chaque affiche du film, Aliocha (le jeune Matveï Novikov) est au centre des préoccupations des spectateurs et de plusieurs personnages du film. Son absence ne l’a sans doute jamais rendu aussi vivant aux yeux de ses parents, les incroyables Marianna Spivak et Alexeï Rozin. Subtilement rappelé en début et fin de film par cette petite banderole de chantier ballottant au vent, la disparition d'Aliocha n’est qu’un prétexte pour ouvrir des portes émotionnelles jamais vraiment poussées jusqu’ici par ses personnages principaux. Même si le scénario est plutôt convenu et la réalisation relativement classique, le film parvient à créer une atmosphère presque anxiogène, à interpeller son public et le marquer durablement. La psychologie des personnages est finement amenée et on tente de les comprendre sans jamais non plus les excuser. A travers cette histoire, c’est aussi une société connectée virtuellement mais horriblement individualiste qui est mise en avant, une modernité où l’égoïsme prend sans cesse le dessus alors que la notion de famille n’aura jamais sans doute été aussi importante que dans ses temps de misère et de violence(s) latente(s). Avec « Faute d’amour », le réalisateur de « Leviathan », nous propose un regard toujours aussi acerbe sur son pays sans qu’il ne soit non plus vraiment jugeant. Sa photographie, sa mise en scène et sa bande son subliment ses intentions et nous amènent peu à peu vers un large panel d’émotions. Réussi et remarquablement interprété, le film mérite vraiment son prix obtenu lors de l’édition 2017 du Festival de Cannes et vaut véritablement la peine que l’on s’intéresse d’un peu plus près à ce cinéma sans langue de bois, où mélodrame et réalisme s’entremêlent pour le pire.. et le meilleur. Date de sortie en Belgique : 27 septembre 2017 Date de sortie en France : 20 septembre 2017 Durée du film : 2h07 Genre : Drame Titre original : Нелюбовь
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