Avis : Premier long-métrage de la comédienne néerlandaise Halina Reijn, « Instinct », est un énième drame psychologique et érotique tendu dans lequel s’affrontent deux fortes personnalités. Ici, il s’agit de celle de Nicoline, une thérapeute dans le monde carcéral et de Idris, un violeur en série violent. Aussi ténue que la résistance de ses personnages principaux, l’originalité de son scénario (co-écrit par la romancière Esther Gerritsen) réside plutôt dans la mise en place de leur rapport de force que dans le dénouement attendu de son intrigue. « Instinct », un film basique L’instinct évoqué dans le titre du film est celui qui tiraille l’être humain doté de raison mais qui s’abandonne à l’empressement de ses pulsions. L’instinct animal qui réside en chacun d’entre nous mais qui sommeille dans l’inconscient, qui se maintient en cage et ne dépasse pas les limites dictées par les interdits de notre éducation, notre bienséance et notre sécurité. La relation entretenue entre Idris et Nicoline (très concluants Carice van Houten vue dans « Game of Thrones » et Marwan Kenzari, Jafar dans le « Aladdin » de Guy Ritchie) a cela de dérangeant qu’à tour de rôle, l’un prend l’ascendance sur l’autre, s’abandonnant à ses fantasmes, les réprimant ou au contraire, les réalisant. Nicoline a la froideur et la distance d’une psychothérapeute mais aussi la solitude d’une enfant surprotégée (ou abusée ?), d’une femme qui ne sait pas véritablement exister. Ses relations parlent pour elles, ses réactions aussi. Attirée par l’interdit, bridée dans sa propre vie, Nicoline a-t-elle jamais entretenu une relation saine avec quiconque jusqu’ici ? L’escalade d’un désir réciproque mais interdit, la séduction malsaine et l’abandon sont présentés dans une atmosphère psychologiquement éprouvante pour ses protagonistes comme pour ses spectateurs et crée par moments un malaise que Verhoeven ou May el-Toukhy (« Queen of hearts ») sont eux aussi parvenus à installer. La manipulation de l’un, la provocation de l’autre, le magnétisme qui s’échappe de ces deux êtres que tout oppose troublent, insupportent ou fascinent et c’est là que l’on décèle tout le potentiel latent de Halina Reijn qui, dans un de ses derniers plans, nous prend à témoin et nous fait comprendre que le « voyeurisme » que nous avons indirectement exercé nous a aussi piégé. Le regard dense de Nicoline face caméra, furtif mais appuyé, nous faisant presque culpabiliser et rappelant, le génie en moins, un procédé qu’Hanneke avait en son temps largement utilisé. Faut-il dès lors se plonger dans cet « Instinct » ? Oui, si vous avez les épaules assez larges et le recul nécessaire pour cueillir l’histoire oppressante de Halina Reijn. Véritable expérience cinématographique immersive, son long-métrage a certes les défauts d’un premier métrage pas toujours maîtrisé mais poursuit et montre qu’il y a quelque chose à creuser. Date de sortie en Belgique : 11 décembre 2019 Durée du film : 1h48 Genre : Thriller psychologique
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