Avis : Film nécessaire à l’interprétation sans faille et à l’histoire authentique percutante, « Just Mercy» de Destin Daniel Cretton est un biopic dont on sort difficilement indemne. Vibrant hommage au travail de Bryan Stevenson, avocat diplômé de Harvard et fervent défenseur des démunis de la région de l’Alabama, « La voie de la justice» (en version française) est rempli d’une humanité qui réchauffe et serre le cœur. Ne tirez pas sur Walter McMillian Monroe, 1986. Plus de 25 ans après la publication du célèbre et mémorable « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » de Harper Lee, l’histoire se répète avec la même fatalité : un travailleur afro-américain se fait condamner pour un crime qu’il n’a pas commis. Trop « noir » pour être innocent, le procès montre pourtant combien les preuves sont futiles et la condamnation scandaleuse. Mais qu’importe si la vie du coupable tout désigné vole en éclats… Dans les états sudistes, mieux vaut voir un faux coupable derrière les barreaux que de faire trainer une enquête durant des mois. A l’heure où le racisme est encore bien présent dans certaines régions des USA, « Just Mercy » nous rappelle que tout cela est loin d’être une fiction… Fort heureusement pour ces prévenus trop pauvres que pour s’accorder une vraie défense, un avocat déterminé à soutenir les "laisser pour compte" vient les écouter et rouvrir leur dossier. En créant Equal Justice, Bryan Stevenson ne fait pas que redonner de l’espoir aux familles séparées d’un mari, d’un enfant, d’un père qu’on leur a arraché sans procès équitable. Il met en lumière les défaillances d’un système où les droits civiques sont bafoués et où mieux vaut être riche et blanc que noir et désargenté. Son film, Destin Daniel Cretton le porte à bout de bras avec une assurance et une implication qui forcent le respect et devant lesquels personne ne peut rester de marbre. Combien y-a-t-il eu de Walter McMillian dans les couloirs de la mort ? Combien d’innocents sont passés sur la chaise électrique ? Comment un pays qui fait prêter serment sur la Bible peut-il se parjurer à ce point ? Pourquoi trente ans après ce combat entamé pour la vérité, existe-t-il encore des victimes à jamais brisées par une justice à deux visages ? Quand on sait qu’une condamnation sur dix dans le couloir de la mort aboutit à une libération faute de preuves, on se dit que décidemment, il y a de quoi s’interroger. La présomption d’innocence semble être réservée à un pan de notre société, peut-on aujourd’hui encore le tolérer ? « La voie de la justice » ne répond peut-être pas à toutes ces questions mais a le mérite de les convoquer chez chacun d’entre nous, sans ton moralisateur qui entacherait la vision mais avec toute la bienveillance que l’on peut attendre face à ce genre de situation. Un face à face passionnant Adapté du livre autobiographique de son héros éponyme (« A story of Justice and Redemption »), « Just Mercy » aurait peut-être mérité plus de densité et de rythme pour être une réussite totale. Néanmoins, si le choix de présenter un combat linéaire et somme toute classique dans son traitement à l’écran peut ternir quelque peu un film qui aurait pu briller de mille feux, on apprécie la délicatesse du metteur en scène et son évocation sans pathos d’une histoire qui aurait bien pu verser dans un cri de rage exacerbé ou une démonstration larmoyante dérangeante. Crescendo, son récit commence par la découverte de quelques récits de vie, parmi lesquels ceux de Anthony, Johnny D (William McMillian) et Herbert, trois personnalités auxquelles on s’attache le temps de quelques heures et que l’on quitte parfois la gorge nouée ou le cœur en berne. Solide film de procès et enquête passionnante, « Just Mercy » est sublimé par un jeu d’acteurs puissant dans sa verbalisation comme dans ses émotions contenues. Michael B Jordan et Jamie Foxx trouvent ici deux rôles d’envergure dont on se souviendra longtemps et font vivre leurs personnages avec une implication réelle et un réalisme confondant. De même, Brie Larson, que l’on a vu exceller dans des cinémas totalement opposés apporte une stabilité et une présence discrète mais appréciée dans un combat que l’on aimerait voir vite se clôturer. Biopic dramatique d’une belle humilité, « Just Mercy » aurait certes pu gagner en profondeur et en pugnacité mais il n’en reste pas moins un film de qualité. Nous poursuivant quelques heures après sa vision, le film de Destin Daniel Cretton (« Le château de verre », « State of Grace») convoque une puissante réflexion et un panel d’émotions autour d’un sujet maintes fois évoqués mais pourtant toujours d’une terrible actualité. Parce que chaque homme a le droit d’être entendu et considéré, le combat de Bryan Stevenson, joliment imagé, a une belle place à défendre dans nos salles ciné. Date de sortie en Belgique : 22 janvier 2020 Date de sortie en France : 29 janvier 2020 Durée du film : 2h17 Genre : Biopic/Drame Titre original : Just Mercy
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