Et si le film donne envie de se plonger dans cette intrigue savamment amenée, il le doit en grande partie à son casting prestigieux ! Outre Edward Norton, nous nous régalons de voir à l’écran Bruce Willis, Willem Dafoe, Alec Baldwin et Bobby Cannavale. De sacrés acteurs pour une enquête bien sombre aux échos étrangement très actuels ! « L.A Noire » version New York Mais où était passé Edward Norton ? Bien sûr, nous avons pu l’apercevoir de manière fugace dans « Alita: Battle Angel » pendant cinq secondes, et avant ça dans « Beauté Cachée » avec Will Smith (2016) et surtout « Birdman » en 2015 mais c’est tout de même peu (et notamment en terme de temps de présence à l’écran). C’est qu’il nous manquait le bougre ! Avec « Brooklyn Affairs », l’acteur/ réalisateur signe son deuxième film, vingt ans après le sympathique « Au nom d’Anna ». Débutant sur des chapeaux de roues, nous sommes amenés à suivre l’enquête périlleuse de Lionel Essrog, un détective privé atteint de la maladie de La Tourette qui cherche à faire la lumière sur l’assassinat de son patron et néanmoins ami (Bruce Willis). Très vite, l’anti-héros se distanciera de ses collègues quelque peu effrayés par l’ampleur de la tâche, le danger et les menaces qui pèsent sur eux. C’est néanmoins l’occasion de prendre le pouls de ce bureau de détectives réunissant les excellents Bobby Cannavale (« The Irishman », « Vinyl », « Blue Jasmine »), Ethan Suplee (« My name is Earl ») et Dallas Roberts (« New-York Unité Spéciale »). Au fil des rencontres, les pièces d’un grand puzzle finissent par s’emboiter grâce à l’aide de Paul, un homme dont on sent qu’il aimerait mener le combat, s’il en avait davantage le courage. Véritablement habité, Willem Dafoe nous prouve une fois de plus son immense talent ! Mais que serait un bon polar sans des personnages ambigus comme celui de Moses Randolph (Alec Baldwin y est impérial !) élu de la ville qui semble tirer beaucoup de ficelles dont celle de l’immobilier de New-York ! D’ailleurs, il est intéressant de remarquer que si la ville est aujourd’hui celle que l’on connait, c’est grâce à la vision et à la détermination de ces grands patrons de l’immobilier qui sont parvenus à imposer leurs réalisations pour faire de New-York une ville moderne, donnée en exemple. Très clairement inspiré de Robert Moses (l’urbaniste responsable de la rénovation de la Big Apple), cette adaptation du livre de Jonathan Lethem est une formidable relecture de l’Histoire américaine contemporaine. Pendant près de 2h25 minutes, le réalisateur et Dick Pope, son chef opérateur sont parvenus à nous faire voyager dans le New-York des années 50 de façon extrêmement réaliste. Tout dans le film y participe et notre regard est fasciné par ce qu’il voit : les quartiers de la ville sont traversés par des ancêtres aux chromes et couleurs pastel brillant de mille feux, et conduites par des hommes et des femmes élégamment vêtus. Voilà un réalisateur qui sait ce qu’il veut et qui l’obtient ! L’ambiance sonore du film n’est pas en reste et nous nous sommes régalés des interprétations de jazzmen dont les influences du bebop de Charlie Parker ou de Miles Davis font plaisir à entendre ! Un héros malgré lui Malgré nous, cette enquête nous fait penser au « Chinatown » de Polanski pour son ambiance mais aussi pour son personnage qui n’était pas destiné à être un héros. Edward Norton est prodigieux dans le rôle de Lionel qui dira dans le film qu’un « anarchiste prend le contrôle » comme en témoigne ses nombreuses bizarreries qui prêtent à sourire. Véritable performeur, l’acteur est fait du même bois que celui de Joaquin Phoenix, désormais visage tout sourire du Joker ! Jamais horripilant malgré son handicap, Edward Norton parvient à insuffler beaucoup de vie et d’énergie dans son personnage. Pourtant, tout n’est pas rose dans ce film noir ! Les deux bémols sont à aller chercher du côté du rythme inconstant et d’un scénario dont l’indice principal est compris par le spectateur mais pas par le protagoniste principal ! Les amateurs d’intrigues policières devront se résigner à attendre que le héros finisse par comprendre ce qui était évident. Heureusement, des rebondissements colorent une note finale qui n’est donc plus si convenue. Même si le film a été écrit avant l’élection de Trump, l’ombre de l’homme d’affaires et actuel président américain plane sur le métrage. D’abord parce qu’il incarne ce qui fait la particularité de New-York, sa grandeur moderne bâtie avec des briques et des ponts. Ensuite, parce que cette enquête révèle les nombreuses métamorphoses architecturales portées par une modernité galopante à peine freinée par les cris des communautés ethniques qui ne demandent qu’à croquer également dans cette Grosse Pomme... Entre bouleversements étatiques, cris de la rue et meurtre, le polar néo-classique d’Edward Norton à décidément beaucoup à dire !
Les effets sonores ne sont pas en reste et témoignent du souci apporté à l’ensemble. Bien sur, le film ne demande pas de faire vibrer les murs du salon mais la scène sonore équilibrée est telle que les détails prennent une véritable dimension. Et que dire de la partition musicale qui touche au divin et qui saura, à coup sûr, vous émouvoir ! ► Les bonus Au nombre de trois, ceux-ci vont à l’essentiel en commençant par le making off : « l’approche méthodique d’Edward Norton » (9’30). Transposition audacieuse du roman de Jonathan Lethem intitulé « Les Orphelins de Brooklyn » ou « Motherless Brooklyn » en version originale, le réalisateur et acteur Edward Norton revient sur ce formidable projet et ses nombreux défis alors que les acteurs témoignent de la facilité et du talent de ce dernier à changer aisément de casquette. Mais ils ne sont pas les seuls à s'être investis corps et âmes dans ce métrage. La belle dame de New-York des années 50 prend véritablement vie à l’écran pour les besoins du film au point de devenir une actrice à part entière grâce au soin apporté à l’historicité des décors, aux nombreux détails et à la musique nostalgique de Daniel Pemberton, un travail minutieux qui le respect. Et que dire de la proposition de Thom York qui donne le frisson ? Daniel Pemberton lui répondra d’ailleurs en version instrumentale pour le plus grand bonheur de nos oreilles ! Les commentaires d’Edward Norton permettent logiquement de profiter de toute l’expertise de son créateur alors que les scènes coupées sont présentes au nombre de cinq sont, comme toujours, l'occasion de découvrir une autre vision de certains moments clés. Cette fois, seule une nous a paru sortir du lot mais son défaut majeur est de dévoiler un peu trop rapidement certains éléments de l’intrigue, raison pour laquelle elle n'a probablement été retenue au montage... Magnifique de bout en bout grâce à son interprétation magistrale , son intrigue et son incroyable atmosphère, "Brooklyn Affairs" est un film à voir et à revoir! Genre : Polar/ Policier Durée du film : 2h24 Titre original : Motherless Brooklyn Bonus: Trois bonus dont un making of très intéressant
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