Sa liberté de ton et son regard amusant sur la société tunisienne en pleine mutation, le regard pétillant d’une Golshifteh Farahani qui crève l’écran et ses joyeuses directions qui nous surprennent de temps en temps font de ce film moderne un petit plaisir universel. La Tunisie en psychanalyse Revenue au pays pour installer son cabinet de psychanalyse, Selma ne s’attend pas à recevoir un accueil aussi froid. Ses voisins sceptiques et sa famille honteuse de la voir pratiquer un tel métier, ses patients envahissants et pas toujours très renseignés, une police zélée qui rend les choses encore plus compliquées, nombreuses sont les barrières qui se dressent sur la route de notre jeune trentenaire déterminée. Gagnant la confiance des uns et attisant la méfiance des autres, recevant le peuple tunisien, parfait reflet de sa diversité, dans une toute petite pièce aux allures de salon de thé, Selma va peu à peu comprendre que même si le peuple s’est soulevé il y a peu, rien n’a finalement véritablement changé. Psychanalyse d’un pays en mutation où les libertés individuelles ne sont pas encore totalement acceptées, « Un divan à Tunis dresse l’état des lieux d’une nation en plein bouleversement socio-culturel et économique: son administration corrompue et sa police intrusive, le besoin d’émancipation des femmes et le poids de la religion, les identités sexuelles refoulées et les cicatrices d’un régime totalitaire dont l’ombre semble encre planer, chaque patient, chaque citoyen croisé apporte sa petite touche au portrait d’un pays qui ne semble pas encore prêt à tout accepter. Considérée comme une immigrée ou une Parisienne hautaine et déplacée, Selma a fort à faire pour s’imposer et rappeler à ce microcosme méditerranéen qu’elle a ses racines ancrées dans la cité. Femme libérée, la jeune psy n’a pourtant pas grand-chose à gagner par ce retour au pays si ce n’est celle de se rapprocher d’une identité qu’elle semble avoir un peu trop longtemps négligée. Film lumineux dans lequel Golshifteh Farahani évolue avec aisance et élégance, « Un divan à Tunis » est rempli de fraicheur, d’humanité et de bienveillance qu’il est plaisant de contempler. Tantôt drôle tantôt plus critique, le récit original de Manele Labidi suit les traces d’autres cinéastes du monde qui ont, de façon subtile, pudique ou plus révélatrice mis leurs films aux services de comédies ou drames de ce même acabit. On pense ainsi à « Beyond the Moutains and Hills », « Trois visages », « L’insulte » ou « Prendre le large », des films qui, à travers des regards humains et des histoires singulières, dépeignent les évolutions et les traditions de sociétés entières. Qu’ils soient boulanger, coiffeuse, employée dans un ministère, femme au foyer, jeune étudiante, imam ou ouvrier, les personnages qui se succèdent sur le canapé marron de la jeune Selma sont tous représentatifs d’une Tunisie aux mille visages mais qui ont pourtant un point commun des plus appréciables : celui de se battre pour devenir les êtres qu’ils ont rêver d’être dès leur plus jeune âge. Avec son premier métrage plein de belles intentions, Manele Labidi leur rend le plus doux des hommages et çà, ce n’est pas négligeable. Date de sortie en Belgique/France : 12 février 2020 Durée du film : 1h28 Genre : Comédie dramatique
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