Contrainte de voyager seule et de partir à la découverte des pétroglyphes situés à Mourmansk, une étudiante en archéologie finlandaise va se confronter à sa solitude, ses souvenirs mais aussi la présence d’un jeune homme russe qui partage sa cabine pour un trajet de plusieurs jours. Discrète, taiseuse et le visage sévère, Laura n’a pas l’habitude ni l’envie de communiquer avec des inconnus. Et encore moins avec Ljoha qui fume, boit de la vodka, s’endort sur la banquette de leur compartiment étriqué dans lequel chaque espace pris empiète sur celui de son colocataire de fortune. Si dès les premières minutes, on craint le drame et une issue convenue, il n'en est rien... La route s'avère bien plus constructive et surprenante qu'il n'y parait. En effet, la force de « Compartiment N°6 » est de parvenir à déjouer nos représentations, la méfiance ou la confiance que l’on aurait placée dans quelques voyageurs rencontrés mais aussi de montrer plus que jamais que plus que l’objectif ou l’arrivée, c’est le chemin parcouru qui compte et qui peut à jamais nous changer. Les petites tensions amenées dans le récit, les rencontres improbables, les confidences et les petits rebondissements font de ce drame nordique un objet filmique intéressant, un film psychologique novateur et prenant. Si on peine à s’attacher aux personnages dans ses débuts, la construction du récit et les sursauts scénaristiques nous font vite changer d’avis. Celle qui s’enfermait dans ses souvenirs et dans son objectif va peu à peu s’ouvrir à la/sa vie et retrouver ainsi un sourire que l’on avait difficilement imaginer s’esquisser et profiter pleinement de ce que ces rencontres et son parcours lui auront apporter.
Durée du film : 1h47
Genre : Drame Date de sortie en Belgique : 26 janvier 2022 Titre original : Hytti Nro 6 De Juho Kuosmanen – Avec Seidi Haarla, Yuriy Borisov et Yuliy Aug
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Mise en scène intelligente, interprétation irréprochable, les qualités sont nombreuses dans cet « Ennemi » qui a déjà fait beaucoup de bruit avant sa sortie dans nos salles. Néanmoins, on lui préfère le tout aussi inspiré « Noces », film plus dynamique et probablement mieux équilibré, lui aussi inspiré d’un fait divers qui avait bouleversé la Belgique. Plantée dans le sable de la plage d’Ostende qu’il filme dans des tons automnaux délicieux, autour des tables des bars ou des casinos, dans les couloirs d’un hôtel luxueux ou dans une chambre où s’entredéchire deux jeunes mariés amoureux, dans la cellule étriquée d’une prison bruyante ou dans la cour d’un établissement pénitentiaire où le temps semble s’être arrêté, la caméra de Stephan Streker épouse parfaitement les faits, regards et gestes de ses différents protagonistes, de ces hommes et ces femmes qui ont côtoyés Louis Durieux, dans ses heures de gloire ou dans sa longue et lente chute. S’il n’y a pas de ressemblance physique entre Jérémie Renier et Bernard Westphael dont il s’est inspiré, si les faits nous font forcément échos mais parviennent aussi à s’en écarter, c’est parce que Stephan Streker n’a pas voulu filmer une affaire sous l’angle de la vérité. Il a plutôt décidé de nous offrir un film neutre sur des événements qui nous paraissent familiers, un métrage irrégulier et parfois étiré en longueur, qui a le mérite de capter notre attention, soulever une série de questions sans nous influencer dans notre propre interprétation, nos impressions, notre empathie ou notre inimitié pour un homme qui ne sait plus où se trouve la limite entre rêve et réalité et qui n’a pour ennemi que son passé et sa personnalité.
Durée du film : 1h45
Genre : Drame Date de sortie en Belgique/France : 26 janvier 2022 De Stephan Streken – Avec Jérémie Renier, Alma Jodorowsky, Emmanuelle Bercot, Félix Maritaud, Zacharie Chasseriaud, Sam Louwyck, Peter Van Den Begin
Qu’il s’agisse des témoins qui livrent leur message sur l’enregistreur de Johnny, un journaliste américain ou de Jesse (Woody Norman), le fils de sa sœur qu’il garde durant son absence, les voix plurielles des jeunes citoyens de notre monde nous questionnent, ouvrent des portes sans les forcer, avec toute leur naïveté, leur insouciante et leur vérité. Filmé dans un noir et blanc qui sublime les personnages et lieux rencontrés, « C’Mon C’Mon » (en version originale) est un joli film brut que l’on contemple, que l’on écoute sagement (le son a une réelle importance dans le récit et est magnifiquement mis en avant) et que l’on suit au gré des obligations professionnelles de Johnny (toujours impressionnant et hypnotique Joaquin Phoenix). Découvrant la complicité qui va naître en Jesse, un petit garçon de 9 ans étonnant, et son oncle qu’il ne connait plus très bien, nous nous prêtons au jeu des balades dans les parcs des grandes villes américaines, des confidences faites au coucher ou lors d’un bain donné… Mais aussi beau soit le film de Mike Mills, il lui manque cette petite émotion qui aurait sublimé son propos, cette proximité qui n’a jamais lieu entre le tandem improbable et les spectateurs qui feuillettent ce magnifique album d’une vie sans jamais être totalement embarqués. Inspiré de « Tirez sur le pianiste » de Truffaut, « La Barbe à papa » de Bogdanovich ou « Les amours d’une blonde » de Milos Forman, le long-métrage de Mike Mills est en effet un bel hommage à ces cinéastes qui ont sublimé la vie autrefois…
Durée du film : 1h48
Genre : Drame Date de sortie en Belgique/France : 26 janvier 2022 Titre original : C’Mon C’mon De Mike Mills – Avec Joaquin Phoenix, Gaby Hoffmann, Woody Norman et Jaboukie Young-White
Ses leçons de vie nous apprennent à lire la nôtre différemment. Quant à Bernard Campan, tout le monde se souvient de ses apparitions drolatiques dans dans "Les Trois Frères", "Le Pari", ou "Les Rois Mages". Pourtant, dès les années, l’acteur dépasse la comédie pour nous toucher avec des films différents et parfois plus intimes à l’image du "Cœur des hommes", de "Combien tu m’aimes" ou encore du très beau "Se Souvenir des Belles Choses". Et c’est précisément dans cette optique que nous parvient ce "Presque". Presque le huitième jour… en plus drôle et plus léger ! Dès les premières minutes, nous suivons le tricycle d’Igor (Alexandre Jollien), livreur de légumes bio. Pédalant le casque audio vissé sur la tête, le destin le mettra en contact (rapproché) avec Louis (Bernard Campan), croquemort devant partir de Lausanne pour se rendre dans le sud de la France pour une cérémonie funéraire. Le film se veut simple dans son approche et assez rapide dans son rythme car jamais nous ne nous ennuyons, au contraire ! Durant 1h32, les deux protagonistes vont se rencontrer, vivre une aventure commune et s’apprécier jusqu’à un final émouvant ! Au fil de leur périple, les compères vont apprendre à se connaitre et alors que le personnage de Louis ne veut qu’aller dans le sud, le personnage d’Igor est trop content de quitter sa petite ville pour partir en voyage ! Et chaque situation est l’occasion de trouver un sens philosophique à l’existence ! Quel régal de voir Alexandre Jollien parler du temps qui passe et précisément de faire le bon acte au bon moment comme le disaient si bien les Grecs avec la notion de Kaïros. Mais cet exemple et tant d’autres colorent le film de situations truculentes et souvent touchantes ! Même si "Presque" ne révolutionne pas le genre, la faute à une intrigue déjà vue, l’histoire qui nous est donnée à voir, la complicité évidente des deux comédiens et amis ainsi que le très beau petit cours de philosophie vous fera assurément passer un très bon moment de cinéma.
Durée du film : 1h31
Genre : Comédie dramatique Date de sortie en Belgique : 26 janvier 2022 Date de sortie en France : 19 janvier 2022 De Bernard Campan et Alexandre Jollien – Avec Bernard Campan, Alexandre Jollien, Marilyne Canto, La Castou, Julie-Anne Roth, Tiphaine Daviot
Ayant choisi de parcourir la République démocratique du Congo armé de sa seule caméra depuis plus de trente ans, le réalisateur espère livrer au monde une vision d’horreur comme elle en a rarement vue. Car du choc ressenti, vient l’espoir de faire bouger les lignes d’une indifférence extrêmement embarrassante pour l’Etat de Droit et une inaction gênante pour les organes officiels de défense de la paix dans le monde. Car ce que nous voyons après les superbes images d’un continent aux paysages magnifiques, c’est la détresse humaine la plus totale. Depuis les montagnes et les forêts du Kivu jusqu’aux rives du fleuve dans la province de l’Équateur, des fragments d’une réalité monstrueuse nous sont contées. A travers « L’empire du silence », ce sont aussi les combats inégalitaires du peuple congolais mais aussi leurs souffrances et leurs espoirs qui sont mis en lumière. D’ailleurs, accompagné de la verve et le courage du Prix Nobel de la paix, le Docteur Mukwege - l’homme qui répare les femmes- Thierry Michel n’a d’autre choix que de témoigner de ce qu’il a vécu et de ce qu’on lui a rapporté depuis trente ans maintenant. Et c’est précisément le fruit de ces échanges souvent poignants et terriblement édifiants qui a permis de rendre possible ce film nécessaire et même vital pour les sociétés qui se revendiquent démocratiques. Durant 1h50, nous suivons –médusés- des exactions d’une violence inouïes perpétrées par des militaires encore présents dans les plus hautes sphères de l’Etat congolais mais aussi par des groupuscules paramilitaires et autres chefs de guerre en proie à la lutte armée la plus terrible sur la population. Au centre des enjeux ? L’or, le cobalt et les minerais rares dont regorge le Congo et que nous utilisons chaque jour pour notre confort personnel. Indispensables dans la construction de nos smartphones et ordinateurs, ces minerais rares et donc précieux sont au centre d’une stratégie économique déshumanisante prônée par l’Etat au détriment de sa population, paradoxalement, parmi la plus pauvre du monde. Le Congo est donc gangréné de l’intérieur depuis un quart de siècle et même le génocide rwandais n’y a rien changé. Au contraire, il a ouvert la voie à toujours plus de représailles, de violence et d’actes de barbarie difficilement soutenables. C’est qu’en plus de montrer une vérité qui dérange, « L’Empire du Silence », est construit à la manière d’une gigantesque enquête où les langues se délient pour témoigner d’un cauchemar toujours présent aujourd’hui. Ce documentaire d’utilité publique- et disons-le- d’urgence publique, prend le temps de donner la parole aux acteurs du drame mais aussi aux dirigeants congolais, aux nombreuses victimes, aux représentants des pays voisins mais aussi aux institutions internationales comme l’ONU. Et nous sommes abasourdis de découvrir qu’un rapport officiel (appelé Mapping) qui répertorie la barbarie dont a souffert le Congo entre 1993 et 2003 n’a toujours pas eu de répercussions judiciaires ! Pire, les noms des tortionnaires sont connus, mais dorment paisiblement dans le tiroir des Nations Unies… à l’abri des regards. Pendant, ce temps, ces monstres agissent en toute impunité et continuent leurs exactions ! « L’Empire du silence » incarne à lui seul une vérité qui certes dérange…mais manifestement pas encore assez.
Durée du film : 1h50
Genre : Documentaire Date de sortie en Belgique : 19 janvier 2022 De Thierry Michel
Amoureux de la vie, des femmes, des diverses techniques qu’offrent le septième art, de ses comédiens et de l’Amour, il a, au fil des ans, décliné les mêmes thématiques dans cinquante longs-métrages : l’amour, l’amitié, l’argent et parfois la mort. Ces sujets, on les retrouve donc tout logiquement dans son dernier film, celui qui lui permet de célébrer la vie mais aussi les incroyables comédiens que celle-ci a mis sur sa route depuis ses premiers pas dans la fiction. Entre l’ « Amour avec des si » et « l’Amour c’est mieux que la vie », rien n’a changé, si ce ne sont les titres de ses métrages, le casting qu’il réunit et les variantes qu’il donne aux histoires ordinaires d’hommes et de femmes qui le sont tout autant. Chaque sortie de film est l’occasion idéale d’entendre Claude Lelouch nous raconter des anecdotes que l’on connait par cœur ou que l’on découvre avec bonheur, mais aussi le plaisir d’entendre sa famille de cinéma parler de lui comme d’un mentor, d’un ami fidèle ou un papa… C’est enfin la possibilité de voir aussi comment cet octogénaire parvient à s’émerveiller de tout, comment il gère la caméra à l’épaule ou son dernier smartphone. Si on aime habituellement errer aux côtés de ses personnages, découvrir la nouvelle version de ses histoires d’amour consommées ou contrariées, quelque chose à changer depuis quelques années. Claude Lelouch prend un réel plaisir à réunir un large panel de comédiens qu’il affectionne et aime plus que tout (il n’a pas son pareil pour filmer et sublimer ses comédiens, la preuve en est une fois de plus avec les images qu’il tire des visages de Sandrine Bonnaire et Gérard Darmon), à faire se croiser des univers différents et des personnalités du cinéma français qu’on n’imaginait pas être associées jusqu’à son dernier film événement… Mais force est de constater que malgré le respect et l’admiration que l’on porte à son regard sur la vie, nous ne retrouvons plus toujours l’étincelle qui éclairait ce qu’il avait à nous dire et à nous montrer. Comme pour « Chacun sa vie », nous déplorons par moments certaines scènes dispensables (l’introduction en est le plus bel exemple), ne comprenons plus toujours où Claude Lelouch nous entraîne si ce n’est dans sa nostalgie, son album de famille et son envie de réunir les grands noms du cinéma. Si l’on apprécie pleinement les clins d’œil fait à quelques-uns de ses précédents métrages (que cela soit dans des répliques ou dans extraits réemployés), nous les aurions préférés plus subtiles et moins maladroitement amenés. ommage à Lino Ventura, Jacques Brel, Robert Hossein pour ne citer qu’eux, « L’amour c’est mieux que la vie » est une anthologie de et selon Claude Lelouch, sans égocentrisme et démesure, mais avec beaucoup de maladresses. Toujours rempli de tendresse pour ses comédiens et les personnages qu’il dépeint (Gérard Darmon, Sandrine Bonnaire, Ary Abittan, Gilles Lellouche, Kev Adams, Béatrice Dalle, Elsa Zylberstein, Robert Hossein, Xavier Inbona ou encore Clémentine Célarié), son dernier long-métrage joue la carte du « trop », de l’émotion et de « la vénération » et noie en partie sa jolie histoire dans des add on déstabilisants.
Durée du film : 1h45
Genre : Comédie dramatique Date de sortie en Belgique/France : 19 janvier 2022 De Claude Lelouch - Avec Gérard Darmon, Sandrine Bonnaire, Ary Abittan, Gilles Lellouche, Kev Adams, Béatrice Dalle, Elsa Zylberstein, Robert Hossein, Xavier Inbona ou encore Clémentine Célarié
Formidable mise en scène du récit daté des années 1940, le film nous emmène sur les routes des Etats-Unis, tantôt par l’intermédiaire d’une fête foraine/cirque ambulant, tantôt par les spectacles de télépathie menés par notre personnage principal, Stan Carlisle. Les décors fabuleux, les atmosphères poisseuses ou cossues proposées tout au long de l’intrigue contextualisent à merveille le récit initial, monté dans un tout autre ordre que le roman mais sans pour autant le desservir. Si l’on regrette bien sûr le choix de voir Stan Carlisle adulte (et interprété néanmoins de façon magistrale par Bradley Cooper taillé pour le rôle) et non plus dans la peau de cet adulescent qui découvre la vie, s’émerveille et met en place les jalons de sa future carrière, on ne peut reprocher cette décision tant elle se met au service de l’histoire de façon convaincante. Certaines directions sont délaissées ou réécrites, la psychologie de certains personnages sont moins détaillées mais rien de tout cela ne gâche le plaisir de (re)découvrir la grandeur et la décadence de notre héros du jour et de ses acolytes. Ancrée de façon adéquate dans l’univers cher à Guillermo del Toro, l’histoire de « Nightmare Alley » lui permet d’exploiter et décortiquer un peu plus la nature humaine et profonde de personnalités a priori banales mais qui, au final, se révèlent bien plus complexes qu’il n’y paraît. Qu’il s’agisse de Bruno, Zeena, Pete, Major Moustique, Molly ou Stan(ton) mais aussi de Mr Hoately ou le docteur Lilith Ritter tous cachent une carte dans leur manche et la jouent à un moment pour le moins étonnant. Convoquant un casting quatre étoiles qui se démarquent tous dans leur rôle de façon ultra convaincante, Guillermo del Toro parvient à donner vie à ces personnages singuliers et à leur donner une impulsion et une authenticité qui masquent sans difficulté ces visages familiers : Willem Dafoe, Rooney Mara, Toni Collette, Cate Blanchett, Ron Perlman et, nous l’avons déjà cité, Bradley Cooper entrent dans la danse sans aucun faux pas et avec tout le talent qui est le leur.
Durée du film : 2h30
Genre : Drame/thriller Date de sortie en Belgique/France : 19 janvier 2022 De Guillermo del Toro – Avec Willem Dafoe, Rooney Mara, Toni Collette, Cate Blanchett, Ron Perlman, Bradley Cooper et Richard Jenkins
Fils de Danièle Thompson, le réalisateur est allé à bonne école et a collaboré avec sa mère mais aussi avec Thierry Klifa, deux inspirations qui l’ont peut-être aidé à chercher ses propres propositions de cinéma. Celle-ci est d’ailleurs très honorable et nous interroge sur le « bien manger », sur la reconversion imposée, sur l’héritage et la filiation mais aussi sur la difficulté de s’accorder et de s’aimer. Comédie romantique classique d’un côté, film interrogateur de l’autre, « Tendre et saignant » a en effet plusieurs angles d’attaque et parvient à lier le tout comme une sauce que l’on aurait longtemps travaillée pour qu’elle s’épaississe et offre une jolie onctuosité. Derrière ses apparences de comédie légère, le film de Christopher Thompson ouvre quelques portes sur la qualité des produits du terroir, sur le lien social qui s’établit dans les commerces de proximité, le combat des artisans pour offrir le meilleur à sa clientèle et la difficulté de perdurer face aux grands groupes qui rachètent tout, organise un monopole au grand dam des véritables passionnés. Porté par le duo formé par Géraldine Pailhas et Arnaud Ducret, « Tendre et saignant » fait se rencontrer deux univers où préjugés, passé, concurrence, espoirs et faux semblants, projets, incompréhensions et complicité ne cessent de s’entrecroiser.
Durée du film : 1h31
Genre : Comédie romantique Date de sortie en Belgique/France : 19 janvier 2022 De Christopher Thompson – Avec Géraldine Pailhas, Arnaud Ducret, Stéphane De Groodt , Alison Wheeler
Et puisqu’une amitié de plus de 20 ans lie le réalisateur Fred Cavayé à l’auteur de la pièce, on se dit que des échanges fréquents ont permis de rendre possible cette adaptation qui parvient, selon le réalisateur, à se différencier quelque peu du matériau d’origine. En effet, certains personnages évoluent différemment, et bien que nous n’ayons pas vu la pièce, le résultat à l’écran est franchement réussi ! Un huit clos maitrisé ! « Thriller intime » selon les dires du réalisateur, la grande force du métrage est de filmer au plus près les personnages avec leurs doutes mais aussi une certaine part d’ombre. Heureusement, Fred Cavayé prend le temps d’installer son histoire et ses personnages afin que la tension monte crescendo sans jamais brusquer le spectateur. Adieu Monsieur Haffmann brosse ainsi une galerie très intéressante de personnages pendant l’occupation allemande. Campés par de formidables comédiens, le film peut compter sur le talent conjugué de Daniel Auteuil (Mr. Haffmann), qui, de son simple regard fait naitre de belles émotions. A ses côtés, Gilles Lellouche est un partenaire de jeu idéal dans le rôle de François Mercier, l’assistant bijoutier de Mr. Haffmann. Ce dernier accepte de racheter symboliquement la bijouterie et de la lui rendre à la libération. Mais bien sûr, tout ne se passera pas comme prévu… Dans le dernier rôle de ce trio concluant, nous retrouvons Sara Giraudeau parfaite dans le rôle de Blanche Mercier. Loin d’être un faire valoir, son personnage prend de l’épaisseur au fur et à mesure d’une intrigue qui risque de surprendre le spectateur. Mais que serait une histoire d’occupation sans une source de danger réelle ? Cette figure trouve sa parfaite incarnation avec Nikolai Kinski (le fils de Klaus Kinski), le commandant Jüngger, un homme élégant et grand amateur de joaillerie qui développe fort bien une attitude ambivalente.
Durée du film: 1h56
Genre: Drame Date de sortie en Belgique/France : 12 janvier 2022 De Fred Cavayé - Avec Gilles Lellouche, Daniel Auteuil et Sara Giraudeau
Et si on écrit ces premières lignes au passé, c’est parce qu’après avoir décanté l’objet filmique qui nous a été présenté, nous continuons de penser que ce n’était peut-être la meilleure des idées. Il y a en effet toutes une série de bonnes idées et de codes qui ont été respectés dans la version de Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett. On retrouve les nombreuses références aux films d’horreur (classiques ou contemporains), de multiples clins d’œil totalement assumés au premier récit de Kevin Williamson (lieux, personnages et même musique sont de retour dans cette version 2022), l’humour bienvenu, les effets de surprises, le retour du casting originel et les mêmes mécaniques bien huilées… autant de madeleines de Proust que l’on prendra plaisir à retrouver ou à effleurer. On retrouve également ce plaisir qu’ont les réalisateurs à utiliser les mêmes méthodes explicatives des choix scénaristiques utilisés, d’évoquer l’évolution du cinéma d’horreur, le besoin d’exploiter des licences jusqu’à la moelle et s’adapter aux demandes d’un public qui deviendrait presque blasé. Et même s’ils le confessent et le justifient dans leur propre métrage, Bettinelli-Olpin et Gillett ne parviennent pas à échapper à la caricature et à être pris au piège de leur propre fonctionnement, quitte à desservir leur idée originelle. Car oui, si on s’est laissé « cueillir » par la nostalgie de « Scream » premier du nom, on a également été très déçus de certains choix, par certaines facilités et par un manque de profondeur ou d’originalité. Ce cinquième « Scream », à force de vouloir copier et s’inspirer des versions passées, finit par être à l’image d’une photocopie que l’on aurait polycopiée à de nombreuses reprises : sombre, illisible et surexploitée. Toujours aussi gore, plus violent que jamais, « Scream 5 » veut s’adapter au public actuel en se voulant trop bavard et explicatif, plus démonstratif et choquant, (des)servi par un casting de jeunes comédiens qui manquent d’épaisseur (Jenna Ortega, Melissa Barrera, Marley Shelton, Dylan Minnette) et une histoire cousue de fil blanc où les surprises n’en sont pas et les bonnes idées de départ délaissées pour une action désincarnée. Sorte de matriochkas dans lesquelles on emboite des références aux films du genre, des rappels du « Scream » original, une réactualisation, une relecture plus moderne du genre et une évolution du propos de départ, le nouvel opus signé par les deux comparses déjà responsables de l’amusant « Wedding Nightmare » (qui nous avaient davantage convaincu) séduira probablement une partie de son public.
Durée du film : 1h55
Genre : Horreur / slasher Date de sortie en Belgique/France : 19 janvier 2022 De Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett - Avec Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette, Melissa Barrera, Marley Shelton, Dylan Minnette, Jack Quaid, Jenna Ortega
S’inspirant du récit de Florence Aubenas, « Ouistreham » nous invite à découvrir les coulisses du métier, les difficultés économiques d’une grande partie de la population française qui se bat chaque jour pour survivre sous le poids des horaires et de la vie qui exigent plus et qui donnent de moins en moins… Pour rendre le plus crédible possible son propos, Emmanuel Carrère croise les regards. Celui du spectateur, bien sûr, mais aussi et surtout celui de Juliette Binoche et de parfaits anonymes dont l’histoire contée est si proche de leur quotidien. Réalisé à la demande de la comédienne, « Ouistreham » s’ancre dans le Nord de la France, au large de Caen, dans des campings ou cabines de ferry, des appartements deux pièces ou des salons de l’emploi où se croisent ceux que certains appellent, à tort, la France d’en bas. Car la France, ce sont toutes ces personnalités-là, pour qui chaque jour est un combat. Des hommes et des femmes qui ne baissent jamais les bras, qui peinent mais trouvent du réconfort dans les plaisirs simples de la vie. « Ouistreham » montre un peu de tout cela, non sans défaut, mais avec une sincérité et une belle humanité, de façon brute et authentique.
Durée du film : 1h44 Genre : Drame Date de sortie en Belgique/France : 12 janvier 2021 De Emmanuel Carrère – Avec Juliette Binoche, Hélène Lambert, Léa Carne, Émily Madeleine, Patricia Prieur, Évelyne Porée et Didier Pupin
Piquée à vif par sa bande annonce énigmatique, la nôtre nous a poussé à partir à la rencontre de Valdimar Jóhannsson, un réalisateur islandais qui a mis son expertise des effets spéciaux au service des gros studios américains avant de renouer ici avec l’épuration et l’efficacité de la suggestion. C’est que, il y a quelque chose de captivant, d’hypnotisant dans « Lamb », une atmosphère glaciale, tendue, où chaque scène recèle son lot de tensions, justifiées ou non. Originale, la proposition de Valdimar Jóhannsson recense plusieurs clés de lecture, de messages sous-jacents ce qui rend cette fable fantastique bien plus complexe qu’il n’y parait et fait d’elle une histoire dans laquelle déteignent quelques références bibliques et de jolies trouvailles oniriques que l’on prend plaisir à mesurer et à décortiquer une fois la séance terminée. De sa scène d’ouverture à sa clôture, « Lamb » nous a pris par la main, comme Maria et Ingvar ont tenu celle d’Ada tout au long de leur chemin commun. Il nous a fait entrer dans l’intimité de ce couple marqué par le passé, dans la joie qu’ils se sont offertes par un hasard peut être calculé. Nous avons vibré, avons été touchés mais jamais nous ne nous sommes ennuyés. Le brouillard des landes, la rudesse de la vie de ce couple isolé de tout, de tous et d’eux-mêmes, la mécanique répétitive des gestes du quotidien et l’absence de paroles auraient pu ternir le film mais lui confèrent au contraire, une profondeur bienvenue qui le sublime. Mais au-delà de son récit et de sa formidable portée, c’est son casting et sa photographie qui nous ont le plus marqués. Noomi Rapace, qui a renoué avec ses origines nordiques et rurales, excelle dans son rôle de Maria, crève l’écran et s’impose dans ses actes spontanés comme dans ses silences troublants. La frêle mais charismatique comédienne nous surprend à nouveau dans ce registre du fantastique et prouve qu’il ne faut pas toujours être dans la démonstration pour s’imposer à l’écran ou dans un rôle de fiction. Quant à la technicité, elle est sobre et totalement maîtrisée, nous permet de nous (re)centrer sur l’essentiel sans nous en détourner. Le scénario est d’ailleurs simple mais pas simpliste, joue avec nos évidences et nous offre quelques twists intéressants…
Durée du film : 1h46
Genre : Fantastique / Thriller Date de sortie en Belgique : 5 janvier 2022 De Valdimar Jóhannsson – Avec Noomi Rapace, Hilmir Snaer Gudnason, Björn Hlynur Haraldsson, Ingvar Eggert Sigurðsson |
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